
Participation de la classe de Défense du Collège Joséphine Baker à la panthéonisation de R. Badinter
Des élèves de Mios ont été invités à Paris pour cette cérémonie très émouvante.

Les élèves se trouvaient sur la partie gauche du Panthéon. Photo A. Liévain
La classe de Défense du collège Joséphine Baker de Mios a réussi la performance d’être la seule de la Gironde à être retenue par l’académie de Bordeaux pour représenter le département lors de la panthéonisation de Robert Badinter.
Ce beau résultat a été obtenu grâce à un travail acharné mené par la 3e7 avec ses professeures de Lettres Classiques et d’Histoire, Audrey Grand et Aurore Liévain. Elles ont monté en mai, avec le soutien de l’école nationale de la Magistrature, une plaidoirie contre l’oubli de Monsieur Robert Badinter. Le Recteur de l'académie, présent à la panthéonisation, a demandé à rencontrer les élèves.
Depuis plusieurs années, l’école nationale de la Magistrature permet à des auditeurs de justice volontaires de prendre part à une activité dite « action citoyenne » à destination de jeunes collégiens et lycéens de Bordeaux et de ses environs. Ces auditeurs par groupe de 4 construisent le contenu de leurs interventions, 3 interventions au maximum, en lien direct avec l’enseignant porteur du projet pédagogique support de cette action

Au premier plan, à droite Aurore Liévain et les élèves présents au Panthéon
Cette année, à l’occasion de la Panthéonisation de Monsieur Robert Badinter, Aurore Liévain a choisi de porter ce projet et de faire écrire par les élèves de la classe-défense une plaidoirie contre l’oubli de Monsieur Badinter. Pour mémoire l’an passé, elle avait fait participer ses élèves à la panthéonisation de Missak Manoukian et avait été également invitée à aller à Paris assister à la manifestation.
Nous extrayons quelques lignes de ce texte pour vous en faire sentir la tonalité et vous invitons à le lire ci-dessous dans sa totalité, il respecte bien l’esprit de ce qu’écrivait Robert Badinter lui-même : La mémoire est un combat permanent.
« L’oubli ne fait pas de bruit, il arrive à pas de loup, il dérobe ce que nous avons de plus précieux,
la mémoire.
Comme une deuxième mort.
En effet, le temps passe et avec le temps, la société s’assoupit et perd sa vigilance.
Nous devons donc faire barrage contre le fleuve de l’oubli afin que Monsieur Badinter
ne meure pas une deuxième fois… »
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Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les jurés,
Aujourd’hui nous ne plaidons pas pour un accusé, nous ne demandons pas une grâce. Nous sommes là pour plaider contre l’oubli. Oui, c’est une plaidoirie particulière. Aujourd’hui, permettez-nous de plaider pour la mémoire de Monsieur Robert Badinter.
Survivant. Homme de conviction. Professeur. Juriste. Essayiste. Avocat. Ministre. Garde des Sceaux. Sénateur. Président du Conseil constitutionnel. Fervent défenseur de la dignité, des libertés et des droits humains.
Robert Badinter, pour nous, vous êtes inoubliable. Pourtant l’oubli nous guette, pourtant l’oubli vous guette.
Pourquoi ? Qu’est-ce que l’oubli ?
L’oubli ne fait pas de bruit, il arrive à pas de loup, il dérobe ce que nous avons de plus
précieux, la mémoire.
Comme une deuxième mort.
En effet, le temps passe et avec le temps, la société s’assoupit et perd sa vigilance. Nous devons donc faire barrage contre le fleuve de l’oubli afin que Monsieur Badinter ne meure pas une deuxième fois.
Robert Badinter entre au Panthéon pour qu’on n’oublie pas ce qu’il a fait, qu’on n’oublie pas qu’on peut changer des lois pour rendre la société meilleure, qu’on n’oublie pas un homme qui a préféré se battre plutôt que de nous laisser sombrer dans la barbarie et la violence.
Nous, élèves de la classe-défense du Collège Joséphine Baker, sommes des passeurs de mémoire et nous voulons incarner cette lutte contre l’oubli.
Mais qui êtes-vous ?
Robert Badinter, fils de Charlotte Rosenberg et Simon Badinter, vous êtes né le 30 mars 1928 à Paris.
Enfant juif, caché sous l’Occupation, vous auriez pu mourir le 9 février 1943, lors de la rafle de la rue sainte Catherine qui a emporté votre père.
Ce drame devient votre boussole car vous voyez alors que la loi peut tuer. La déportation de votre père ancre en vous une quête d’humanité et détermination à lutter contre l’injustice.
Vous mettez au service de la France la vie que le destin vous laisse. Cette vie sera consacrée à ce que d’autres aient la vie.
Vous luttez contre l’antisémitisme, les « faussaires de l’Histoire » et pour la mémoire des crimes contre l’humanité. Vous permettez l’abrogation de lois indignes et la suppression d’articles de loi discriminant les homosexuels, vous permettez l’élargissement du droit des victimes et la captation vidéo de procès historiques.
Après de brillantes études de lettres et de droit, vous devenez professeur et enseignez dans diverses universités. Vous vous engagez en politique aux côtés du Président François Mitterrand et le 17 septembre 1981, vous avez convaincu notre pays qu’aucun être humain ne devait être exécuté par l’État.
Robert Badinter, vous avez su faire évoluer les mentalités par votre voix. Ce combat qui paraissait impossible, abolir la peine de mort en France, vous l’avez mené pour nous tous.
Vous l’avez dit, la justice ne doit jamais se transformer en vengeance. Non, le couteau ne doit pas tomber, le crime ne doit pas changer de côté.
Le 9 octobre 1981, la France abolit donc la peine de mort. Depuis ce jour, Robert Badinter, votre nom est synonyme d’humanité, une humanité qui se refuse à tuer, une humanité qui reconnaît à la justice le droit de se tromper.
Mais nous, que pouvons-nous faire pour que l’on ne vous oublie pas ?
Votre combat nous honore. Votre courage nous inspire. Nous avons moins d’éloquence que vous mais nous pourrons : Dire non quand la majorité dit oui. Raconter. Transmettre à notre tour. Faire vivre la mémoire. Observer. Réfléchir. Faire preuve d’esprit critique. Prendre en main notre avenir de citoyen. Oser porter notre voix. Voter. Commémorer. Représenter nos prédécesseurs tout comme vous vous êtes inscrit dans la lignée des vôtres : Victor Hugo, Aristide Briand, Albert Camus et tant d’autres.
L’oubli, c’est l’assassin de notre mémoire. Faisons-la donc vivre. En effet, rien n’est acquis, un jour des voix pourraient réclamer le retour de la peine de mort : il faudra alors nous souvenir pourquoi nous l’avons abolie.
Sans mémoire, la démocratie s’affaiblit.
Alors nous ne vous oublions pas, nous ne vous oublierons pas.
L’oubli est une défaite, la mémoire une victoire.
Vous avez dit un jour : « les amis qui s’éloignent emmènent avec eux une part de nos souvenirs, c’est-à-dire de nous-mêmes. » C’est vrai, quand vous êtes parti, vous avez emmené avec vous une part de nous tous, une part de la France.
Dans un dernier entretien en 2024 vous exprimiez le regret que l'avenir ne soit plus devant vous.
Robert Badinter, nous reprenons votre flambeau.
Notre devoir de mémoire, c’est de nous rappeler des actes qui ont changé le cours de notre avenir.
Notre devoir de mémoire, c’est nous souvenir des erreurs passées pour ne pas les reproduire.
Le seul assassin qui doit être assassiné, c’est l’oubli.
Mesdames, messieurs, nous requérons la peine absolue contre l’oubli. Mesdames, messieurs, aujourd’hui, en ce 9 octobre 2025, par cette cérémonie d’entrée au Panthéon, vous permettez que le nom de Badinter soit toujours prononcé au présent et jamais au passé, que son combat reste ancré dans notre génération et celles à venir.
Par ce symbole, la République honore Robert Badinter et rend sa mémoire et ses victoires éternelles.
Classe-Défense de 3e7 du Collège Joséphine Baker de Mios
aidée de leurs professeures de Lettres Classiques,
Audrey Grand et d’Histoire, Aurore Liévain
BOYER Laurine ; BRISOT Lilou ; CORNIL Paul ; CREVOT MIGNET Timothée ; DELVAQUE BERTRAND Luka ; DESCOTTES Hugo ; DOYHAMBOURE Clara ; GUITTON Naomie ; HAROU Raphaëlle ; HAZIZA LAMBERT Timéo ; HUET Maya ; LAFFORGUE PUYO Lola ; LAURENT Mati ; LAVERGNE Simon ; LIEGEY Clémence ; MÉRIGOT Louis ; MERLO Kyle ; MOLLE AUBARBIER Rafaël ; PASQUET LEFEBVRE Gabriel ; PODWYSOCKI Nolhan ; PUIG Axel ; QUINEMANT Lola ; SARIA Soledad ; SENNESAL Louna ; SIN Zoé ; VASSEUR Kewann ; ZANIN DAMAS Matthéo
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