Arès - Square des grands principes républicains

Dévoilement de la statue en hommage aux femmes victimes de violences

Le soleil froid de ce samedi 30 novembre 2024 illumine le square des grands principes à Arès. De nombreuses personnalités civiles et militaires sont réunies à l’invitation du maire Xavier Daney et de son conseil municipal pour une manifestation organisée dans le cadre de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Une statue doit être inaugurée, œuvre du sculpteur arésien Dominique Pios. Madame Frédérique Porterie, procureur de la République de Bordeaux est la marraine de l’événement.

Les personnalités présentes. On reconnaît de droite à gauche M.Xavier Daney maire d'Arès, MME Frédérique Porterie, Procureure de la République de Bordeaux, MME Sophie Panonacle député de la 8eme circonscription de la Gironde, M.Dominique Pios, sculpteur, les officiers et sous-officiers représentant la gendarmerie nationale et le représentant de la base aérienne 106 de Mérignac.

La cérémonie débute par l’hymne : « Debout les femmes »

Le directeur de cabinet du maire évoque les drames qui se jouent en réalité derrière les mots féminicides, violences intra familiales : la terreur des victimes, les traumatismes des enfants souvent eux-mêmes cibles de sévices, le désarroi des familles. Il s’indigne : « nous ne devrions pas être ici ce matin » mais souligne que les devoirs de justice, de solidarité et de mémoire imposent de se retrouver dans ce lieu qui, pour la ville d’Arès, symbolise les grands combats de la République. Citant Marie Curie ; « dans la vie il n’y a rien à craindre et tout à comprendre », il souhaite que cette matinée soit une occasion de comprendre.

Le maire prend alors la parole pour reconnaître lui aussi que la journée est « triste et douloureuse » ; La spirale infernale : amour, haine, violence le glace d’effroi et constitue pour lui une aberration totale.

Il remarque cependant un accroissement du phénomène et se désole de l’impuissance des élus locaux à déceler les signes annonciateurs des drames. Il insiste sur la nécessité de cet hommage à la fois effort de sensibilisation et preuve de mobilisation. Il appelle à la solidarité envers les victimes, leurs enfants et leurs proches et avoue le sentiment de honte et de colère que lui inspire, en tant qu’homme, l’accomplissement de tels actes.

Dans ce square, dédié à la célébration des grands principes fondateurs de notre République, Xavier Daney considère que ces violences faites aux femmes traduisent une volonté de domination des hommes en contradiction totale avec notre devise nationale en particulier le principe d’égalité. Il en appelle donc à un changement de mentalité fondé sur le respect et la réciprocité et il encourage les femmes à rompre le silence qu’elles s’imposent souvent. Il en profite pour remercier les associations qui viennent en appui aux victimes de violences conjugales et/ou intra familiales en particulier l’association « Solidarité Femmes Bassin ». Ses remerciements vont également aux services de police, de gendarmerie et aux pompiers pour l’écoute et le réconfort qu’ils apportent aux victimes.

                           Sophie Panonacle députée de la 8ème circonscription

A son tour Sophie Panonacle, député de la 8ème circonscription, rappelle à l’assistance que « se taire c’est se rendre complice ». Elle cite donc les chiffres : 70% des femmes sont confrontées au cours de leur vie à des violences sexistes et sexuelles, 122 féminicides ont eu lieu en France depuis le début de l’année, dans le même temps, 773 femmes victimes de harcèlement se sont suicidées ou ont tenté de le faire, chiffre trop souvent ignoré ou passé sous silence. Elle insiste sur l’importance de ne jamais « anonymiser » ces femmes. Elle rappelle certaines des initiatives qu’elle a développées : des tables rondes sur le sujet organisées sur le Bassin d’Arcachon depuis 2018 (auxquelles elle déplore une présence trop modeste des CCAS des communes concernées), la mise en place d’une unité de victimologie au centre hospitalier d’Arcachon, la mise à disposition de logements d’urgence pour accueillir les femmes (en nombre trop insuffisant regrette-t-elle), la sensibilisation des jeunes dans les établissements scolaires.

Au niveau national, elle mentionne certaines des dispositions adoptées depuis 2017 : 8 lois votées contre les violences conjugales, la mise à disposition du numéro 3919 plateforme numérique de signalement des atteintes aux personnes et d’accompagnement des victimes de violences sexuelles et sexistes, la généralisation du dispositif « téléphone grave danger », le fichier des auteurs, l’aide d’urgence et le déploiement progressif du « pack nouveau départ ». Elle détaille les mesures récemment annoncées par le 1er ministre pour renforcer les actions déjà entreprises

  • chaque département sera doté d’une maison des femmes avant la fin 2025,
  • il sera possible de porter plainte dans chaque hôpital de France doté d’un service d’urgence ou d’un service gynécologique d’ici à fin 2025,
  • une mission ayant pour objet d’évaluer l’ensemble des questions et des enjeux autour de la soumission chimique été confiée à 2 parlementaires (une députée et une sénatrice)
  • l’expérimentation du remboursement par l’assurance maladie, dans plusieurs départements, de kits individuels permettant de détecter une soumission chimique,
  • les moyens consacrés par le Gouvernement à l’aide universelle d’urgence augmenteront de 7 millions d’euros dans le budget 2025.

(mesures dont la mise en œuvre a été suspendue par la récente démission du gouvernement - NDLR)

Alors que les femmes sont les 1ères victimes des hommes dans un monde devenu de plus en plus violent Sophie Panonacle exhorte chacune et chacun à « être dans l’action ».

                             Dominique Pios sculpteur

Avant le dévoilement de sa sculpture, Dominique Pios en explique certains des symboles. Elle n’a pas de visage car pour lui la féminité est intemporelle et universelle. De même elle n’a pas besoin de vêtements. Et ses chaines rouillées sont brisées. Son œuvre doit nous amener à réfléchir, il cite Saint Exupéry « on ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux ».

La lecture du poème de Jacques Prévert « pour toi mon amour » accompagne la révélation de la statue.

L’autre temps fort de la manifestation commence alors avec le dépôt d’une rose blanche pour chacune des 54 femmes dont le prénom a été révélé sur les 122 féminicides recensés depuis le début de l’année 2024. Une longue minute de silence lui succède.

         Dépôt de roses devant la statue

                          Frédérique Porterie Procureure de la République

Vient enfin la prise de parole attendue de la procureure de la République à Bordeaux Frédérique Porterie, marraine de cette cérémonie. Elle aussi fournit quelques données statistiques concernant les victimes de violences conjugales : ce sont des femmes majoritairement âgées de 30 à 48 ans, elles n’ont pas ou plus d’activité professionnelle, les auteurs sont des hommes français âgés de 30 à 59 ans n’ayant pas ou plus d’activité professionnelle. Le plus souvent une substance altérant le discernement est associée à la commission des faits. 81% des femmes avaient signalé les faits de violence, 90% des femmes avaient porté plainte et 9 mineurs sont décédés, en 2022, victimes d’infanticides dans un contexte de conflit conjugal.

Ces chiffres sont pour elle l’expression d’une « tragédie » à laquelle toute la société est confrontée, elle cite alors René Char « nous sommes dans l’inconcevable mais avec des repères éblouissants ». Pour elle le féminicide est un déni des droits fondamentaux de la personne et un déni des bases de la République, il est donc de notre responsabilité collective, en tant que citoyen de nous opposer à ce phénomène. Ces violences qui sont la traduction d’un ordre patriarcale ancestrale ne sont cependant pas une fatalité, la force de la loi et la dynamique des actes quotidiens (éducation inclusive, soutien aux victimes, accompagnement des auteurs pour éviter la récidive…) sont des armes puissantes pour les combattre.

Elle veut croire que l’égalité homme femme n’est pas une utopie et que chacun, chacune est concerné.

Le symbole de cette statue peut être un déclencheur d’action.

Elle conclut par cette citation de Gandhi : « appeler les femmes le sexe faible est une diffamation, c’est l’injustice de l’homme envers la femme, si la non-violence est la loi de l’humanité, l’avenir appartient aux femmes ».

La cérémonie se termine sur une note d’apaisement aux accents de la chanson de Julien Clerc « femmes je vous aime »

 

La section Gironde de l’ANMONM était représentée à cette cérémonie par Marie-Christine Plessiet qui en a fait le compte rendu et par Gérard Chenot à qui l’on doit le reportage photo

Pour toi mon amour   Poème de Jacques Prévert

Je suis allé au marché aux oiseaux
Et j'ai acheté des oiseaux
Pour toi
mon amour
Je suis allé au marché aux fleurs
Et j'ai acheté des fleurs
Pour toi
mon amour
Je suis allé au marché à la ferraille
Et j'ai acheté des chaînes
De lourdes chaînes
Pour toi
mon amour
Et je suis allé au marché aux esclaves
Et je t'ai cherchée
Mais je ne t'ai pas trouvé
mon amour